venerdì 2 novembre 2012

Il gigante e la bambina


Durante la lavorazione di Au hasard de Balthazar di Robert Bresson, Jean-Luc Godard si presenta sul set per un'intervista al regista da pubblicarsi sui Cahiers du Cinema. Il regista all'epoca era sposato con  Anna Karina, che senza indugio mollò per la protagonista bressoniana, un'altra Anna (!).

« Cet homme qui m'aimait et que j'aimais... »
Un jour de juin 1966, j'écrivis une courte lettre àJean-Luc Godard adressée aux « Cahiers du cinéma », 5, rue Clément-Marot, Paris-8
e
. Je luidisais avoir beaucoup aimé son dernier film, «Masculin Féminin ». Je lui disais encore que j'aimais l'homme qui était derrière, que je l'aimais,lui. J'avais agi sans réaliser la portée de certainsmots, après une conversation avec GhislainCloquet, rencontré lors du tournage d'« Au hasardBalthazar » de Robert Bresson. [...]
Lentement Jean-Luc m'attira vers le lit
enretirant mes vêtements, les siens. Il me guidaitavec une infinie délicatesse, attentif au moindre demes tressaillements, anticipant un baiser, unecaresse. Ses mains sur ma peau me procuraientdes ondes de plaisir qui me bouleversaient.Comme me bouleversa sa façon de me fairel'amour. Je sus tout de suite y répondre : nos corpss'étaient immédiatement accordés, « trouvés »,comme il me le dira plus tard. Je réalisais que jevenais de faire vraiment l'amour pour la premièrefois de ma vie, que j'aimais ça. Un monde deplaisir s'ouvrait devant moi, grâce à cet homme quim'aimait et que j'aimais. La gratitude, l'envie de
l'embrasser, de mieux connaître son corps, de toutlui donner du mien, tout cela m'étourdissait. [ ...]
La rencontre entre ma mère et Jean-Luc
eut lieupeu après. Elle l'appelait « monsieur » et lui «madame ». Il était intimidé, elle s'efforçait d'êtrepolie. Comme nous nous apprêtions à sortir dîner,il l'invita à se joindre à nous. Elle refusa avecviolence. Je vis alors dans ses yeux le dégoût qu'illui inspirait. Un dégoût radical et définitif. Même luiserrer la main lui demanda un effort.
«Anne ne doit  pas rentrer au-delà de minuit »,
dit-elle sur le pasde la porte. Je me taisais, humiliée d'être traitéecomme une petite fille alors que je n'étais pluscensée l'être depuis longtemps. Jean-Luc prenaitles choses avec humour :
« C'est compliquéd'aimer une mineure ! »
Et dans l'espoir de medérider :
« Ta mère finira par s'y faire. »
Je passailes jours qui suivirent à tenter de réviser lagéographie. J'avais du mal à me concentrer, priseentre l'amour de Jean-Luc et l'hostilité de mamère. [ ...]

Une année studieuse, par Anne Wiazemsky, Gallimard 2011

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